Article proposé par Toto, paru le 13/05/2014 07:54:23
Rubrique : L'attelage de Tradition, lu 3207 fois. Pas de commentaires
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''Mon Grand Livre de l'Attelage'' : histoires de voitures


 

 

 

         L'histoire d'un Pill-Box et de son harnais

 

         Préambule :

         Il y a 37 ans, il n'existait pas de voitures hippomobiles modernes de qualité; par contre, on trouvait encore, pour des sommes très modiques (à partir de 1.000 F, c'est-à-dire à partir de 150 € actuels) des voitures anciennes authentiques, parfois en assez bon état. Mais on n'avait que très peu de choix quant au modèle, et il y avait toujours au moins un peu de restauration à effectuer, en recherchant pour certaines parties des artisans spécialisés à qui faire appel.

         Depuis, ces voitures se sont faites très rares car, au prix cité plus haut, il faut ajouter un parking abrité pendant 37 ans … J'ai pu dater le texte qui suit grâce au 'Grand Livre' dans lequel nous notons toutes nos activités d'attelage depuis bientôt 40 ans.

 

         L’histoire :

 

         En ce qui me concerne, cette histoire commence en 1975: nous avons ressorti le break-wagonnette de mon arrière-grand-père (1880) de son hangar au Grand Moulin, où il attendait depuis 30 ans. Pour le remettre en état, il fallait refaire la peinture, les garde-boue, garde-crottes et rembourrages, remettre des coussins et des porte-lanternes, et surtout lui adjoindre un timon.

 

         Étant alors ignare en la matière, je me suis adressé au menuisier de Nanteuil qui, s'il connaissait son métier, ne connaissait pas plus que moi les voitures hippomobiles: ce timon a donc été fabriqué en chêne, et Mr GIRAUDON (Maréchal-Ferrant) lui a adjoint des crapauds et une trompe: le résultat est un véritable bélier, dont l'avant est toujours dans notre sellerie.

 

 

Mon premier timon, en chêne (le vert): comparaison de la trompe et des crapauds avec ceux de timons plus normaux 

 

         Nous avons d'abord attelé ce break en 1976 à un (il avait des limons) avec Diabolo: il était beaucoup trop lourd; ensuite, en utilisant le nouveau timon, avec une paire de poneys dont chacun connaissait déjà l'attelage à un; en Mai 1977, nous l'avons utilisé pour débourrer Hermine par la méthode du maître d'école. Le 12 Août 1977, nous avons essayé de pratiquer la même méthode avec Juniper (mère de beaucoup de poneys d'attelage, dont Mistral et Ramsès), mais elle a rué par-dessus le timon, s'est pris les pieds dedans et l'a cassé. Nous n'avons plus essayé d'atteler cette jument par la suite, car elle marchait très bien sous la selle et nous faisait un beau poulain chaque année.

 

 

Break wagonnette de 1880

 

 

détails du Break Wagonnette

 

         J'étais bien ennuyé car je voulais participer au concours d'attelage d'Hardelot le 21 Août: je me suis alors rendu compte qu'il fallait des voitures hippomobiles différentes pour pratiquer le débourrage et les concours d'Attelage. Les voitures neuves à 4 roues n'existaient pas alors (le mécano de la Générale* a essayé son prototype en 1982, sous des regards particulièrement sceptiques, puis des modèles pour chevaux ont commencé à se développer, et des modèles pour poneys sont apparus à la fin de 1983): j'ai donc recherché un squelette ancien.

 

         C'est ainsi que, après un série d'appels téléphoniques à des vendeurs éventuels de voitures hippomobiles, je suis parti de l'Oise, un matin d'Août 1977 (entre le 14 et le 17), avec l'estafette tirant notre petit plateau, chez un brocanteur spécialisé en voitures hippomobiles, dans le Cher: je lui ai acheté notre 'squelette' (qui vient de la Lozère), alors en très mauvais état (il a fallu refaire tout le plateau en bois et le siège avant de pouvoir l'utiliser).

 

         Comme il restait encore un peu de place à l'arrière du plateau, je lui ai acheté également un

Pill-Box, et il a fallu utiliser une corde pour attacher la porte arrière du plateau qu'on ne pouvait pas fermer complètement. J'ai également acheté à ce brocanteur, en les démontant sur des voitures complètement pourries, trois mécaniques (systèmes de freinage) que nous avons posées ultérieurement sur ce Pill-Box, sur la Charrette Anglaise et sur le Gig.

 

*: Bernard ROBIN avait comme pilote d'essai Mme la Générale MASSU, spécialiste en renversements.

 

 

 

'squelette' de débourrage: avec cette voiture, on n'est pas derrière son attelage, mais au-dessus. On est obligé d'y être bien assis, et elle sert aussi à corriger la position des meneurs qui ont tendance à prendre une position 'de crapaud'

 

 

 

le garage du squelette

 

         Je ne sais donc pratiquement rien sur la genèse du Pill-Box (*) : c'était probablement à l'origine une voiture à ânes, fabriquée pendant l'entre-deux-guerres dans le Berry.

 

         Comme je n'avais toujours pas de timon, je suis passé en revenant chez un autre brocanteur hippomobile, Michel BOUQUET, près de Troyes: je lui ai acheté deux timons en frêne (pour le break et le squelette), et il m'a présenté deux harnais d'attelage à un identiques, adaptés à la taille de nos poneys, que j'ai également achetés. C'est par la suite ce second brocanteur, bon bricoleur,  qui a fabriqué mes coussins de guides, a rechâtré les roues du break, a rallongé son essieu conformément au règlement FFE et lui a adapté un frein à disques.

 

         Il commençait à se faire tard et, ne trouvant plus de poste d'essence ouvert à Troyes, j'ai dû m'arrêter devant une pompe et attendre qu'elle ouvre le lendemain matin, en dormant dans l'estafette remplie de mécaniques, de harnais et de timons. Les téléphones portables n'existaient pas non plus, et on s'est inquiété chez moi.

 

         Le 18 Août 1977, nous avons essayé le Pill-Box avec Diabolo: j'ai noté: 'je ne peux pas demander d'allongement car les postérieurs sont très près de la caisse, qui est verticale à l'avant'. J'ai alors poncé et repeint (vernis) cette voiture, que nous avons surtout attelée à l'étalon Loustic (un peu plus petit que Diabolo, il avait déjà été attelé à la voiture de randonnées), à partir de Décembre 1978. Mais, à la 6ème séance, le 9 Juin 1979, Loustic s'est mis à ruer et a cassé les brancards, qui étaient fort vermoulus.

 

         J'ai donc commandé à Montreuil de nouveaux brancards, cintrés dans les deux sens comme les brancards d'origine: je les ai demandés 20 ou 30 cm plus longs que les précédents pour que nos poneys ne risquent plus de toucher la caisse. Le bois du siège a également été changé à ce moment-là. Mais cette voiture ne servait que rarement, et je n'ai jamais poussé à nouveau sa restauration au point de peindre ces nouveaux brancards. Personnellement, je trouvais son siège trop bas, et je préférais pour la mener placer un petit banc vert sur ce siège, ce qui était particulièrement inélégant.

 

 

le Pill-Box en mouvement: le réglage des harnais n'est pas encore tout à fait terminé ...

 

 

         Et, un beau jour de l'automne 2013, Marie et Jean-Luc ont entrepris de restaurer à nouveau cette voiture, et de la restaurer complètement . . .

 

         Nonette-Cuirs a posé un nouveau garde-crottes en cuir sur les ferrures d'origine, et a fabriqué un coussin de passager et un coussin de guides (armatures en bois) recouverts de cuir.

 

        

 

 

Particularité du Pill-Box: sa caisse est tellement basse qu'elle est traversée par l'essieu

 

         Revenons aux harnais, achetés le même jour que la voiture. Ils étaient peu usés et pas spécialement antiques, ce qui signifie qu'ils avaient probablement été fabriqués entre 1960 et 1970. La qualité des différentes pièces était fort inégale; en définitive, il ne reste plus maintenant qu'un seul de ces deux harnais. Les brides, bien que fragiles, m'ont servi longtemps en concours.

        

         Les sellettes n'ont pas fait long feu, mais elles avaient de très bons arçons que j'ai réutilisés par la suite. Les blanchets des bricoles étaient ridiculement étroits: après les avoir démontés, je les ai remontés sur les cartables à dos de mes enfants ! Cependant, le cuir des bricoles était joliment ciselé, avec double couture, et a pu être conservé en y substituant un nouveau blanchet plus large, fourré avec du feutre. Les traits, les dossières, les bracelets de brancards et les reculements (bombés) étaient très corrects. J'ai progressivement refait à la main à peu près toutes les coutures, qui étaient des coutures à la machine, mais j'ai conservé la bouclerie en laiton, excellente (et introuvable en 1977).

 

         Le harnais actuel provient essentiellement de ces harnais achetés en 1977: Nonette-Cuirs n'a fabriqué entièrement que la bride, les guides, le surcou et la sangle. La sellette (nue, sans dossière) a été achetée au début de 2008, et ultérieurement raccourcie de 6 cm de chaque côté car c'était un modèle pour cheval.

 

Emmanuel VANTROYS,  Mars 2014

 

 

(*) ndlr: la photo du Pill-Box  a fait l'objet d'un  "Quiz du dimanche ... " et le nom de cette voiture a suscité beaucoup de commentaires.  

 

http://attelage.org/f_article_read.php?aid=24316  

 

http://attelage.org/f_article_read.php?aid=24333


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