Article proposé par JeanClaudeGrognet, paru le 17/10/2020 11:45:50
Rubrique : Interviews, lu 2651 fois. 2 commentaires
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Portrait: MAGALIE AILLAUD, une étoile montante ?


 

                           MAGALIE AILLAUD,   une révélation précoce...   

                                    photo Catherine Fort

 

            On découvre depuis peu Magalie Aillaud sur les concours. Son ascension a été fulgurante, jugez plutôt.

          Première  compétition en 2016 au Garric avec El Nuno un cheval lusitanien né chez Odile et Didier Decramer et offert lorsqu'il était poulain au couple Aillaud. Benjamin l'a débourré à son retour des États-Unis quelques années plus tard.

          Magalie Aillaud: « El Nuno est un cheval parfait c'est le cheval de la famille, les enfants le montent, mon fils fait du tir à l'arc avec, moi je fais du concours attelé, c'est aussi mon cheval de spectacle. Ma première compétition était en club. Je suis sorti de mon premier dressage en pleurant, je me suis trompé dans ma reprise... J'avais 35 ans ! Pour ma première maniabilité au Garric, première porte, deuxième porte, troisième porte, quatrième porte, cinquième porte… avec un total de cinq balles ! Je me suis vraiment demandé ce que je faisais là ! Vraiment je ne me suis pas dit à ce moment-là que j'allais continuer à faire de la compétition. »

          Avec cette entrée très enjouée et très ensoleillée de la discussion (vous pouvez imaginer le léger accent), je pressens un interview dynamique, agréable, et révélateur d'une personnalité hors du commun.

          J'évoque l'année 2017 avec déjà la jeune meneuse en épreuve amateur au Printemps de l'Attelage à Uzès avec Fandango un autre cheval lusitanien. Fandango était le cheval de réserve de l'attelage de Benjamin, il avait déjà un peu de métier me dit Magalie.

 

Magalie et Atomo

Uzès, Fandango à gauche et Atomo à droite, Magalie et Benjamin

         

          MA: « j'avais quelques appréhensions en attelage, mais Fandango est un cheval très sûr, et j'ai pris beaucoup de confiance avec lui. »

          JCG: 2018 déjà cinquième au championnat de France amateur à Lignières…

          MA: « Bah voilà ! (rires). Faut dire que j'ai un coach qui s'y connaît un peu, alors ça aide ! Bien sûr j'ai la chance d'être suivie au quotidien sur l'attelage, mais je m'occupe également des chevaux de spectacle et je suis cavalière. Je regarde beaucoup les autres travailler, les interventions de Ben dans les stages et je suis toutes les séances de coaching. J'ai donc énormément d'informations, j'absorbe tout ce qui peut se dire et se voir. Je pense qu’être cavalière est un de mes atouts. »

          JCG: nouvelle progression en 2019, une première et une seconde place au CAI**de Saumur avec Fandango et Atomo, et première sortie à l'étranger au CAI*** de Nebanice (CZE) avec une 5ème place.

          MA: « Atomo est le cheval de spectacle de Benjamin. Il est en photo avec les chevaux en grande liberté. Benjamin devant et moi à l'arrière avec Elnuno.

 

Equestria photo Antoine Bassaler

          JCG: encore une belle progression en cette année 2020 avec une troisième place française au CAI**du Pin, derrière Marion Vignaud et Fabrice Martin. Avez-vous pensé à ce moment-là que la sélection pour Pau était imaginable ?

Le PIN photo Mélanie Guilllamot

          MA: « je pense qu'au PIN nous avons montré que nous étions prêts, avec un beau résultat au marathon et en maniabilité. On a montré que nous étions solides, en progrès et stables. Par la suite sur le concours de Chablis nous avons roulé à notre mesure, sans excès pour préserver les chevaux. Faire ce que l'on sait faire mais pas plus étaient les consignes de Quentin Simonet. Je ne croyais pas trop à cette sélection, mais Ben m'avait dit deux ans plus tôt : je te prépare pour le championnat du monde. »

 

A gauche Atomo à Chablis, à droite Fandango à Alixan, photos Ivanie Petit Richard

          MA: « encore une fois il faut dire que mes conditions sont exceptionnelles avec la présence quotidienne de Ben, des chevaux bien préparés physiquement et bien dans leur tête. J'ai le choix de faire le championnat avec Fandango ou Atomo qui a plus de caractère. Nous avons décidé de prendre Fandango avec qui j'ai plus d'expérience. Atomo sera le cheval de réserve de l'équipe de France. Fandango je ne l'ai jamais poussé, il a augmenté par lui-même sa vitesse dans le marathon. C'est lui qui m'a toujours emmené jusqu'à ces derniers temps, où nous faisons maintenant la compétition pour la gagne ensemble. J'aime le marathon, même si j'ai toujours mal au ventre avant le départ. J'ai toujours une minute dans la tête pour mon mari qui est derrière et les enfants au bord de la piste. La maniabilité est aussi une épreuve que je commence à affectionner. Il est vrai que le spectacle aide beaucoup pour le mental dans les compétitions: gestion du stress, organisation de la pensée, être dans l'instant présent...

          PAU je suis évidemment très contente d'y aller, les chevaux sont prêts, je suis très fière, c'est une reconnaissance du travail que nous avons accompli. Je vais prendre de l'expérience sur ce premier championnat du monde. On va faire du mieux possible. »

          MA: « les lusitaniens sont des chevaux guerriers. Ils ont un grand cœur, sont très proches de l'homme, il faut bien les préparer et prendre le temps de les construire. Les chevaux ibériques ont été élevés pour le travail en troupeau, ils vivent avec l'homme, ils sont faciles. On a beaucoup de relationnel avec ces chevaux là. »

          JCG : quel est le rythme de travail d'une semaine, entre le sport et les spectacles ?

Magalie et Benjamin

          MA: « nous avons une vingtaine de chevaux de spectacle, de liberté, de voltige, de haute école. Nous mettons en avant la pluridisciplinarité, l'utilisation des chevaux sous toutes les formes. Le temps que nous y consacrons est fonction des projets. Le COVID nous prive des spectacles, ils sont tous annulés depuis mars.  

          En général nous sortons tous nos chevaux le matin pour la gymnastique ou le travail de fond. L'après-midi est consacré au travail spécifique. Le calendrier est constamment adapté. Depuis quatre ans nous avons posé nos valises et nous nous installons à Realville en face des écuries des Elfes Blancs. Nous montons une écurie, nous avons acheté une maison, nous sommes en pleine installation, nous nous partageons entre les travaux, les parpaings et les chevaux !

          JCG : votre couple respire le bonheur !

          MA: « oui nous sommes très amoureux, on a une passion commune, nous avons de beaux enfants, qui se révèlent aussi passionnés par les chevaux. Oui nous avons beaucoup de chance. »

 

          La vie à deux et les spectacles

          MA: « alors que Benjamin était en activité professionnelle aux écuries des Elfes Blancs, j'avais acheté une petite maison à retaper sur la colline d'en face, sans savoir qu'il y avait un centre équestre. Ayant eu l'occasion de pratiquer l'équitation dans mon adolescence, et ayant envie de remonter à cheval, j'ai acheté une trotteuse de réforme à 1000€. La première fois que je suis montée  dessus et que je suis partie en balade, pour m'arrêter je finissais dans les arbres ! Là je me suis dit qu'il devenait impératif de reprendre des cours et de dresser la trotteuse. Plus je tirais plus elle accélérait !

          Aux Elfes, Benjamin donnait des cours gratuits tous les matins à sept heures pour les moniteurs d'équitation et d'attelage, et toute personne motivée pouvais accéder à ces cours sous condition d'être à cheval à sept heures du matin dans le manège tous les jours sauf  le lundi. C'est ce que j'ai fait pendant un an. Pour ceux qui n'avaient pas de chevaux, le club pouvait en prêter un.

          Benjamin donnait des spectacles. Durant le spectacle d'été j'ai participé aux présentations, et ainsi nous avons passé de plus en plus de temps ensemble.… Et puis nous ne nous sommes plus quittés. Nous avions du monde, 1200 spectateurs en places intérieures l'hiver et 3000 places assises en extérieur l'été.

          La direction équestre de Cavalia a fait une proposition à Benjamin, et ainsi nous sommes partis au Québec en 2009 pour travailler avec eux. Nuno notre fils avait un an. Nous avons parcouru le monde en présentant des spectacles. Je suis rentrée en France avec la naissance de nôtre fille Ewen. Benjamin est revenu à la  compétition et dans la foulée nous avons créé une troupe au Haras de Tarbes, pour finalement créer Tagad'Art. »

Magalie et Elnuno, au fond Benjamin et Atomo

Photos de Sophie Delfosse Dupont

 

 

          JCG: comment arrive-t-on à cette discipline des chevaux en liberté ?

          MA: « il faut avec un travail quotidien compter deux ans d'éducation. On prend les chevaux un par un, puis deux, puis trois...etc... L'éducation est logique, on n'est jamais sur des chevaux enrênés, les chevaux ne sont jamais contraints. On parle d'éducation jamais de dressage. Le dressage c'est la dernière partie, quand le cheval collabore avec l'homme. Mon numéro en liberté je peux aussi bien le faire dans une salle que dans le pré où sont tous les chevaux. Les récompenses sont les caresses, jamais de sucre ni de carotte. La récompense c'est aussi un état d'esprit autour du cheval. Dans ce que le cheval a fait ce que l'on attend de lui, on arrête de lui demander. La voix est importante de même que la posture autour du cheval. Il faut connecter le cheval à son éducateur. L'année dernière à Equestria, les chevaux en grande liberté ont été présentés par notre fils de 11 ans. Il commence à tourner en compétition, il a beaucoup de qualités sportives, un gros mental, une grosse faculté de concentration, il ne prend pas la pression… Il a  pris ça du côté de papa ! Notre fille de huit ans débute la compétition aussi. Ils baignent dedans comme dans les spectacles. »

          JCG: whaouuuu...

Nuno et les 8 chevaux en liberté - photo Frédéric Lavergne

Photos Frédéric Lavergne

 

 

Photos Antoine Balssaler

         

MA: « quand le cheval a compris son travail, si la personne au milieu est bien dans sa tête et a compris le positionnement avec ce qu'il demande, les chevaux n'opposent aucune résistance, il n'y a aucune pénibilité pour eux. Ils sont en troupeau ils sont heureux. Ils sont dans leur état naturel ils ont un leader. Un cheval qui a compris reste à sa place, c'est une machine qui répète avec plaisir. Il prend sa place, il en est fier. Benjamin est capable de redonner de la fierté à un cheval qui l'a perdu. Faire sortir les personnalités des chevaux et des humains et les respecter...Ben est aussi exigeant, il est très travailleur. C'est mon maître d'équitation, j'ai un profond respect et une admiration pour son approche avec les chevaux. On se lève tous les matins avec cette flamme là, avec la flamme de la passion. »

 

 

Equestria 2015, 1ère présentation -  photos Antoine Bassaler

          MA: « En 2016, nous devions aller au Bahreïn présenter notre spectacle Tagad’Art, mais les contrats ont été annulés avec les attentats de Paris. Nous avons tout perdu. Et puis nous avons fait face, nous avons habité 18 mois dans une semi frigo avec les enfants grâce à des amis qui nous ont prêté de l'argent. Aujourd'hui on s'en sort, les chevaux nous ont fait garder le cap, et on se concentre sur la compétition. »

          MA: « un grand merci à tous nos amis du spectacle et photographes pour ces belles photos »

          JCG : et moi un grand merci pour cet interview passionnant, et je vous souhaite la meilleure réussite possible à Pau.

          © JCG/ attelage.org

 

         

         

 

 

 


  Commentaires
-du sang neuf par VALEGRO (17/10/2020 17:16:33)
-De la part de Julie par JUJU (17/10/2020 17:21:39)
Que votre joie demeure et montre le bon chemin.