Pierre Cazas

          Pour reprendre une expression d'aujourd'hui, Pierre Cazas est du modèle "clivant", et comme dit la chanson "celui qui dit la vérité doit être exécuté" .

         Comme tous ceux qui n'hésitent pas à exprimer des opinions, il dérange les certitudes, les rêves et les autosatisfactions. Pierre Cazas est un bon juge international O, il serait dommage de ne pas écouter ses avis et conseils. Il a été nommé par la FEI pour juger le Championnat d'Europe à Izsak, voici ce qu'il répond à attelage.org.

a.o : quelques mots sur ce Championnat d'Europe ?

PC : " Izsak a été un Championnat d'Europe formidable. Très bien organisé, très bonne atmosphère, mais aussi avec  les éternels problèmes d'électricité. Les pays de l'Est veulent se positionner et organisent beaucoup de concours internationaux. La Tchéquie qui est un petit pays va organiser 4 CAI en 2014, la Hongrie veut retrouver ses lustres d'antan et revenir au premier plan international."

a.o: quelles évolutions à attendre de la FEI dans un proche immédiat, règlement ou autres ?

PC:  "pas de changement concernant la notation et ses critères. Ce qui "agace" un peu c'est la grande disparité dans les notes qui se produit de temps à autre sur quelques figures. C'est un sujet qu'il n'est pas facile d'aborder , il faudrait en parler sans tabou. On en parle par petits groupes  et j'ai souvent des discussions avec Reiner  Wannenwetsch  un juge allemand."

a.o: quelle perception as tu de l'attelage français et des résultats d'Izsak ?

PC: "les résultats des 3 attelages présents recouvrent l'ensemble de la prestation des attelages français sur la saison. Je pense notamment aux derniers concours de Bréda, et de Donaueschingen. Je réponds de manière globale, sur les 8 ou 9 attelages aujourd'hui concernés par les JEM.

         Toujours se rappeler que la note de référence en dressage est de 35 points. Je parle dans l'esprit d'une participation pour accéder au rang des meilleurs et non pas pour figurer et uniquement participer à des concours aussi prestigieux soient ils, ça ne m'intéresse pas.

         Au marathon le nombre de points de référence est de 90.

         En maniabilité la référence est 0, le sans faute dans le temps.  

         Je constate que les performance n'ont guère évolué. Il n'y a pas en France aujourd'hui un attelage qui approche les performances requises. En dressage les meneurs sont globalement à + 80% de la note de référence. En marathon c'est + 15% à + 30%. En maniabilité en dehors du zéro faute il n'y a pas de salut... Mis à part la 16 ème place sur 34 de Sébastien  les français ne sont pas dans la première moitié du classement. Voilà pour le constat sur 3 concours majeurs.

         En ce qui concerne le dressage,  je crois que majoritairement il y a un problème avec les chevaux, sans parler du travail qu'il faut mettre dessus . Il y a un très petit groupe qui  possède des chevaux ayant un potentiel pour approcher une note de 45. Certains attelages possèdent 1, 2 ou 3 chevaux intéressants, c'est insuffisant. Il y a de très mauvais choix dans les chevaux achetés par les meneurs. Je me pose la question et je pose la question:  les meneurs ont ils  bien conscience du travail, du temps à passer  et de l'organisation qu'il faut pour accéder aux 40-45 points le seuil indispensable ? La plupart des meneurs n'ont aucune méthodologie de travail. Il faut avoir un programme de progression cohérent, si tenir, avoir de la persévérance dans la méthode car rien ne peut donner de résultats sur du court terme. Aujourd'hui il faut travailler tous les jours avec un coach qui connait son affaire. C'est d'ailleurs valable pour les 3 catégories d'attelage.

         En ce qui concerne le marathon, les français ne sont pas mauvais dans leur technique, mais ils sont limités dans la performance parce que leurs chevaux ne sont pas dressés. Les obstacles d'Izsak étaient hyper techniques et serrés. Il faut passer par le plus court en allant vite  pour espérer un bon classement . Ce n'est possible qu'avec des chevaux dressés, assouplis, réactifs, très en avant  et aux ordres. Il faut des chevaux perméables. Si l'on veut bien se donner la peine d'analyser les résultats, on voit bien que les meilleurs en marathon, au delà des incidents toujours possibles, sont en très grande partie les meneurs qui sont dans les meilleurs au dressage.    

         En ce qui concerne la maniabilité aujourd'hui le sans faute est obligatoire. Il n'y a pas de salut sans un sans faute dans le temps.  Là encore sans un dressage abouti il n'y a pas de précision dans la vitesse !"

a.o : les meneurs souhaitent toujours des conseils pour le travail ...

PC: " revenir aux bases du dressage, assouplissez, multipliez les exercices, mettez votre cheval à l'écoute... après on entre dans la leçon particulière, adaptée à chaque cheval et à chaque meneur... je ne peux en dire plus que ces généralités après c'est de l'entrainement et du coaching."

a.o : connais tu le quotidien de travail de quelques meneurs étrangers ?

PC: " oui et les français pourraient faire comme eux... ils ont tout ce qu'il faut avec les aides FFE ou IFCE. Il faut que les meneurs s'investissent plus et soient suivis par un coach personnel."

L'interview se termine ainsi. Pierre n'envisage que la performance et les exigences qui vont avec. Il a bien raison, mais ce n'est que mon avis ...  

JCG