Article proposé par JeanClaudeGrognet, paru le 15/03/2009 18:41:29 Rubrique : Les références > Dressage : technique, lu 2093 fois. Pas de commentaires |
|
par Tjeerd Velstra, Champion du Monde en 1982 à Apeldoorn
J’aimerais pour conclure traiter de l’entraînement dans
le terrain, qui est également très important et qui constitue une diversion
appréciée des chevaux. Ceux-ci ne tardent pas à se languir si on les entraîne
trop dans la carrière ou sur le carré de dressage. Il est important de varier
l’entraînement: les longues courses à travers la forêt, sans que les chevaux
soient mis à contribution trop intensément, ont pour effet de les rafraîchir et
de les maintenir attentifs.
Lors de l’entraînement dans le terrain, il est tout
d’abord important que les chevaux disposent d’une condition suffisante. Cette
dernière doit être effective et bonne. Il faut espérer qu’il est possible de
travailler régulièrement et tranquillement en forêt ou sur de beaux chemins
recouverts de sable. S’il n’existe pas de chemins traversant champs ou forêts,
on peut commencer par longer les chevaux un peu plus longtemps avant de les
atteler car trop de travail sur les routes dures est néfaste.
Au début, une demi-heure en forêt et sur les chemins
sablonneux est amplement suffisante. Un peu de pas, du trot, retour au pas, un
entraînement à intervalles tout à fait normal: trotter environ 5 à 10 minutes,
puis continuer au pas jusqu’à ce que le pouls et la respiration aient retrouvé
leur rythme normal, ensuite reprendre le trot. On peut ainsi augmenter
successivement les phases de trot. Une fois que les chevaux ont acquis une
bonne condition, on peut effectuer une heure de trot tranquille sans problème.
Le trot rapide a peu de sens à l’entraînement, car il ne
contribue que très peu à la condition; un bon trot de travail dans la nature
est ce qu’il y de plus efficace. La promenade au pas constitue l’un des
meilleurs exercices pour la condition; c’est particulièrement important en
début d’année. Bien sûr, cela prend plus de temps; on y consacrera les soirées
un peu plus longues, ou on prendra le temps nécessaire le samedi et le
dimanche.
Je pars par exemple le dimanche avec l’attelage et n’effectue pratiquement que du pas, un peu de trot, une demi-heure de pas, 15 minutes de trot, à nouveau
une demi-heure de pas, etc.; je suis ainsi trois heures en route.
D’une fois à l‘autre, on peut constater les progrès que les chevaux font au
pas. Il n’est non plus jamais nécessaire de mettre les chevaux vraiment en
avant; au printemps, il faut qu’ils trouvent tout d’abord d’eux-mêmes la
cadence qui leur convient.
Fiabilité
II faut mettre l’entraînement printanier à profit pour
habituer les chevaux à de nouveaux objets, à des choses qui n’effraient pas que
les jeunes chevaux. On pénètre dans le village, traverse les carrefours, va à
la gare, partout où des difficultés surgissent, jusqu’à ce que les chevaux
n’aient plus peur de rien. Si l’un des chevaux est hypersensible, il est
préférable d’atteler à deux: le cheval nerveux ou craintif avec un cheval plus
âgé et calme. S’il subsiste tout de même des difficultés, on travaillera un peu
le cheval en question au préalable, afin qu’il ne soit pas trop frais. Ensuite,
on replace les chevaux face au problème, et celui-ci se résout de lui-même. Les
chevaux qui ont alors toujours peur et qui ont un comportement quasi-hystérique
ne conviennent vraiment pas pour l’attelage.
Régularité
Dans le terrain, les chevaux doivent bien s’habituer à
leur propre cadence, et tous les quatre doivent vraiment tirer. Lors d’un long
parcours dans le sable, il est très important que tous les quatre chevaux
exercent la même traction, et pas uniquement les volées ou les timoniers. Si on
a l’impression que les timoniers tirent moins, il faut reprendre les chevaux de
volée et mettre en avant ceux de derrière, sans toutefois modifier la vitesse.
On peut également effectuer cet exercice sur un chemin de terre battue
légèrement en pente. Afin que chacun apprenne à travailler correctement, il est
important de changer de place les chevaux de volée et les timoniers,
spécialement lors de l’entraînement dans le terrain.
Entraînement aux obstacles
Quand je commence à entraîner dans l’eau et entre les
arbres, c’est tout en tranquillité, toujours au pas; entrer dans l’eau
s’arrêter, traverser, ressortir de l’eau, nouvel arrêt, et toujours dans le
calme. Entre les arbres également, surtout au printemps, au pas, lentement,
j’effectue des tournants serrés, je m’arrête. Puis j’essaie d’avancer le timon
avec le palonnier antérieur bien lentement contre l’arrière-main des chevaux de
volée, afin qu’ils s’y habituent sans perdre leur calme.
Il convient d’effectuer de véritables exercices au pas chaque samedi, pendant 3
ou 4 semaines. Il faut toujours prendre garde que les chevaux se décontractent.
Ce n’est qu’une fois que les chevaux sont décontractés,
que l’extension est bien effective, qu’ils commencent à allonger leur dos et
que l’arrière-main travaille en souplesse que l’on peut commencer à exiger un
pas plus rapide. Si les chevaux sont encore trop relevés et trop tendus, il ne
faut pas les pousser, car il en résulterait un accroissement de la tension, et
les chevaux seraient alors incapables de fournir un pas correct.
Le trot rapide
Comme je l’ai déjà dit plus haut, le trot ne doit pas
être trop rapide; un joli trot léger, légèrement rassemblé, avec une faible
pression sur la main est préférable. Après quelque temps, on peut essayer sur
un tronçon de chemin neutre si les chevaux atteignent 18 ou 20 km/h. Si on a l’impression d’avoir gardé cette cadence pendant un kilomètre sans galoper, on
rejoint immédiatement un bon rythme de travail. Ainsi, les chevaux n’ont pas
l’occasion de s’habituer à une faute quelconque, telle que par exemple prendre
le galop, traquenarder, etc. Je n’exerce pour ainsi dire jamais le trot rapide
chez moi, car je sais que mes chevaux en sont capables. Et il arrive pourtant
souvent, lors du 4ème ou du 5ème concours — car il y en a un tous les quinze
jours — qu’ils commencent à traquenarder ou essayent de galoper, On a alors
bien de la peine à les en empêcher. Celui qui trotte toujours aussi vite à la
maison sera confronté d’autant plus souvent à ces problèmes.
Il y a toujours quelqu’un qui m’accompagne pour
récompenser les chevaux et leur flatter l’encolure, afin qu’ils soient
tranquilles. Si on force toujours le rythme à l’entraînement déjà, les chevaux
deviennent toujours plus chauds, et ils veulent aller toujours plus en avant.
C’est pourquoi il est important de maintenir les chevaux calmes, et ceci non
seulement au printemps, mais pendant tout l’entraînement, afin de couper court
à toute possibilité de panique.
Il est néfaste de bloquer souvent les chevaux à
l’entraînement, c’est-à-dire de toucher un arbre au point qu’ils ne puissent plus
tirer. Si cela arrive trop souvent, les chevaux ne tarderont pas à ne plus
tirer du tout. Ils ont alors — et ils ont raison — l’impression que ça ne sert
de toute façon à rien, ils n’essaient même plus et abandonnent. Il est
important que tout l’attelage soit décontracté et prêt à s’engager à fond dans
le travail, Ils sont alors prêts à déraciner un arbre lorsqu’il faut vraiment
tirer, car ils savent que si ils tirent tout vient. Les chevaux se rendent très
rapidement compte de cela. Mais lorsqu’on reste sans cesse bloqué, ils perdent
rapidement la foi en leur force.
Lorsqu’on franchit des obstacles dans le terrain, il est
très important que les chevaux de volée s’abstiennent de tirer. En fait, on
passe un obstacle dans le terrain en tant qu’attelage à deux. Les chevaux de
volée sont là pour ne rien faire; ils doivent bien obéir et laisser le fanion
rouge sur leur droite et le blanc sur leur gauche. Ce sont les timoniers qui
ont à fournir tout l’effort.
On peut s’entraîner aussi souvent qu’on le veut sur les
obstacles; il n’est cependant pas nécessaire de le faire plus de deux fois par
semaine. Et un peu plus tard, lorsque la saison de concours est plus avancée et
que les chevaux vont déjà bien dans le terrain, il n’est pas primordial non
plus de s’exercer chaque semaine sur les obstacles ou autour des arbres. A la
maison par exemple, les chevaux savent exactement ce qu’on veut d’eux; il est
par conséquent très important de se renouveler sans cesse, en plaçant des
chaises ou des objets blancs à un certain endroit par exemple, afin que les
chevaux s’habituent à tout et restent flexibles. C’est alors seulement que «
l’entraînement à l’obstacle» prend tout son sens:
Comme je l’ai déjà dit, il est très important que les
timoniers tirent. On peut aussi s’arrêter entre les arbres, tourner les volées
à gauche et placer un assistant devant eux. On récompense les chevaux
de volée et effectue divers exercices avec les timoniers: un peu vers la
droite, un peu vers la gauche, légèrement en avant, quelques pas de reculer.
Ils s’aperçoivent ainsi qu’ils peuvent tout faire même lorsque les volées sont
immobiles. Parallèlement, ces derniers se rendent compte qu’ils ne doivent pas
toujours avancer lorsqu’on travaille derrière eux.
On met ensuite les timoniers en place, également
accompagnés d’un groom afin qu’ils restent bien calmes, on les récompense, et
ce sont les volées qui vont à gauche, à droite, un peu en avant, un peu en
arrière, etc.
A l’entraînement, je répète souvent un exercice qui est très important pour les
chevaux de volée et qui n’a rien à voir avec un accrochage. Je dirige les
volées contre un arbre quelconque. Les chevaux ont parfois tendance à vouloir
dépasser l’arbre chacun de leur côté.
J’aborde l’arbre tranquillement, au milieu de la paire des volées, un cheval
ayant la tête à gauche de l’arbre, l’autre à droite. Je reprends le cheval que
je veux laisser passer et l’appelle par son nom. Ainsi, il apprend à garder la
tête du bon côté de l’arbre. Il faut exercer ceci avec les deux volées.
Il est à mon avis très important que les chevaux de
volée ralentissent, individuellement ou ensemble, sur mon ordre, à ma voix, et
qu’ils se faufilent ensuite à travers un passage étroit sans que la panique
n’éclate. Si on exerce ceci avec beaucoup de calme, on obtiendra des résultats
extraordinaires.
Il ne faut jamais s’énerver lors de l’entraînement sur
les obstacles dans le terrain. Si quelque chose tourne mal, si on est coincé ou
qu’un cheval a enjambé un trait, il faut tout d’abord obtenir l’immobilité et
le calme de tout l’attelage avant d’y remettre de l’ordre. On étudie tout
d’abord exactement la situation, et peut- être trouvera-t-on une solution
appropriée pour sortir l’attelage du mauvais pas où on l’a mis. Il n’est jamais
bon de frapper les chevaux avec le fouet lorsque des problèmes surgissent, car
ils ne font alors que s’énerver, ils ont encore plus peur, perdent confiance,
commencent à ruer, paniquent, et tout tombe à l’eau. Je ne cesse de le répéter:
« le calme est la seule solution valable».
Lorsque le calme a été transmis aux chevaux, on peut
aussi aborder les obstacles plus rapidement. Mais seulement quand on a le
sentiment d’avoir les chevaux bien en main, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas
nerveux et obéissent bien. C’est alors seulement que le moment est venu
d’effectuer quelques tournants un peu plus rapidement, afin que les chevaux
apprennent à le faire.
Ce sont là quelques points de repère à propos du terrain et de l’attelage dans
le terrain.
Le parcours d’obstacles
Le franchissement d’obstacles constitue un exercice
intéressant, et finalement pas le moins important. En fait, les obstacles sont
une combinaison entre le dressage et le terrain; seuls les chevaux qui font
preuve d’obéissance dans le terrain, qui sont bien aux aides, peuvent faire leurs
preuves dans le terrain. Franchir des obstacles est en fait très facile avec
des chevaux bien aux aides et obéissants.
Au début, on disposera les bornes de façon à ce que les exercices ne soient pas
trop difficiles. On doit enseigner aux chevaux le respect des marques. S’ils ne
les respectent pas, ils font souvent tomber eux-mêmes une balle. Que faire?
On prend 5 ou 6 marques et les juxtapose, ce qui les alourdit et les rend plus
impressionnantes, et on laisse les chevaux les toucher. Ils le font une fois,
peut-être deux, mais la troisième fois, un cheval intelligent saute la borne ou
retire la jambe. Il apprend ainsi que les marques ne sont pas des choses
légères et molles, mais des objets durs qu’on ressent lorsqu’on s’y frotte.
J’ai également entendu dire que certains meneurs effectuent le même exercice
avec des objets durs qu’on sent lorsqu’on les renverse. Toutefois, s’il devait
arriver une fois qu’on passe dessus avec la voiture, celle-ci pourrait
facilement se renverser. Ma méthode s’est avérée suffisante.
Lorsque je m’entraîne sur les obstacles, je ne m’accorde
pas une marge de 30 cm, mais toujours de 10 cm environ. Si je réussis avec 10 ou 15 cm, 30 cm doivent être réalisables. Bien sûr, cela ne va pas toujours, car
ça dépend aussi des chevaux. En concours, si les chevaux se précipitent
parfois, ou s’énervent, on perd facilement le contrôle et le parcours
d’obstacles ne réussit pas du tout. En dressage, on peut tricher un peu, dans
le terrain la même chose, car les arbres ne sont pas munis de balles qui
attendent qu’on les renverse. Par contre, lors du parcours d’obstacles, il
suffit que quelque chose aille un peu de travers, la balle tombe, et l’épreuve
est la plupart du temps décidée.
C’est lors du parcours d’obstacles que les chevaux devraient
obéir le mieux aux aides du meneur et participer à fond, afin de travailler au
centimètre. La confiance des chevaux est primordiale pour cette épreuve
partielle. Ils doivent savoir qu’ils ont exactement à exécuter ce que le
«patron» demande d’eux.
Construire un huit est un excellent exercice pour la conduite en obstacles:
deux voltes de 18 m de diamètre, et passer de l’une à l’autre. On peut par
exemple changer de volte et effectuer un S. Un exercice assez difficile, mais
les chevaux s’y habituent.
Au bout d’un certain temps, les chevaux ne devraient plus considérer les
marques simplement comme des objets, mais carrément les chercher. Les chevaux
de volée voient les marques, et ils passent bien ensemble entre elles,
pratiquement sans qu’on ait à les diriger. La correction en finesse est
effectuée avec les timoniers, qui réagissent immédiatement et sont indépendants
des volées.
Tjeerd Velstra in Mémoriam Achenbach 1985